13.05.2013 | La Libre Belgique | door Marie Baudet
Une nouvelle création à tiroirs d’Anne-Cécile Vandalem. Au KFDA.
Après “(Self) Service” où elle explorait l’enfermement tant physique que mental, après “Habit(u)ation” et ses extrapolations familiales, Anne-Cécile Vandalem tend vers l’aboutissement de sa trilogie des parenthèses. Sans la clore encore car “After the Walls (Utopia)” est le premier terme d’un binôme – qui sera bouclé au Kunstenfestivaldesarts 2014 avec “After the Walls (Dystopia)”. Aujourd’hui le rêve, demain sa réalisation. Et toujours des murs, réels ou virtuels, à prendre en compte, à bâtir peut-être, voire à déconstruire.
C’est donc à la présentation d’une utopie que sont ici conviés les spectateurs, chacun muni d’un badge où il aura inscrit son prénom, et portant l’adresse du site (www.afterthewalls.com) où rejoindre une communauté virtuelle allant d’un point à l’autre du projet.
Le guide se présente, “Bernard Loizeau, venu d’on ne sait où”, et sous ses traits sans aspérités (barbe courte, chemise ciel, costume gris) déploie un discours qui ira s’amplifiant. Le ton général sera celui d’un prédicateur dont la voix, amplifiée, se fait proche de l’auditeur, et qui parsème son discours d’interjections rassurantes. Sur le terrain de la conviction, Bernard Loizeau sait y faire. L’architecture, dit-il, est sa spécialité. Aussi interroge-t-il dans cet exposé la propension de l’homme à s’enfermer (l’”incarcération permanente” qu’est notre vie), sa tentative perpétuelle de retrouver ou reconstruire l’abri premier et perdu, l’utérus maternel. Mais aussi le pouvoir de l’imaginaire face aux forces de la réalité. Là où “le réalisme est la bonne conscience des salauds”.
Anne-Cécile Vandalem a nourri ce monologues d’emprunts : à Gaston Bachelard, Michel Serres, Le Corbusier, Baudrillard, Fassbinder Dans la théorie comme dans la poésie, de l’urbanisme et du modernisme à la psychanalyse, les citations y sont tantôt habilement fondues, tantôt manifestes. De même, les références abondent dans ce qui apparaît comme le fruit d’une imposante recherche. Le tout composant un corpus d’une grande densité. En résulte une durée (1h40) qui gagnerait à s’alléger un peu au fil de l’évolution de cette création.
Les visions d’avenir du siècle dernier se heurtent à la réalité du présent. Sur ce terreau fleurissent les orateurs messianiques. Y compris celui d’”After the Walls (Utopia)”. Vincent Lécuyer abolit sans peine le quatrième mur pour cette conférence théâtrale où explose son talent protéiforme. Du meneur de revue au théoricien, en passant par l’”entertainer” de music-hall, l’acteur habite tous les registres. Au risque de perdre le public dans ces méandres – qui cependant ont pour vertu d’étayer le propos : nos géographies physiques et psychiques, ce qu’en font les décideurs, ce que nous-mêmes avons le pouvoir d’en faire, tout “incertains et vulnérables” que nous soyons.
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